!-- Font Awesome -->

30 mai 2014

My addictions of the week




Au menu cette semaine : M. et Mme Rêve, Mad Men, Royal de Luxe, Real Humans, Le mur de Planck, The Good wife, Cannes et son palmarès...

Je suis un peu à la ramasse côté blog, mais ces jours-ci j'ai fait le trajet quotidien entre Nantes et Angers pour un stage, je ne me plains pas - j'ai eu tout loisir de lire plusieurs livres. Une autre manière d'apprécier le train. Ce coup-ci un billet plus axé culture. C'est parti ! 


27 mai 2014

The Homesman

J'ai déjà parlé ici de mon amour pour les western (écrits ou filmés), et j'avais beaucoup aimé le premier film de Tommy Lee Jones, présenté à Cannes, 3 hommes et un enterrement. Ajoutez-y la très talentueuse Hilary Swank - et toutes les raisons étaient réunies pour que je file au cinéma voir The Homesman

J'avais vu quelques images et je connaissais les grandes lignes de l'histoire, mais le résultat est très différent. Tommy Lee Jones prouve ici tout son talent de réalisateur - en nous transportant dans le Territoire du Nebraska (pas encore un état), l'acteur américain nous dévoile une facette longtemps cachée de "la conquête de l'Ouest" : son échec.

Le spectateur découvre les Badlands - ces plaines immenses où ne poussent aucun arbre, où un hiver rude détruit les maigres récoltes de ces immigrés qui rêvaient d'une nouvelle vie, mais ne voient que la mort autour d'eux. Elle réclame les mères, les enfants, les nourrissons. Rien ne pousse. Et pourtant c'est là que Mary Bee Cuddy (Hilary Swank) s'est installée, dans l'espoir de trouver un époux - mais les années passent et Mary Bee est désespérément seule. Les hommes qu'elles croisent refusent d'épouser cette vieille fille qu'ils trouvent laide et autoritaire. La vie dans le midwest est tout sauf aisée, le blizzard, la neige, puis les chaleurs intenses, une terre peu fertile - tout pousse ces migrants à abandonner sauf Mary Bee Cuddy. Très pieuse, elle accepte une mission particulière : ramener en Iowa, trois épouses qui ont perdu la tête - elle engage George, déserteur alcoolique, dont elle sauve la vie d'une pendaison. Le voyage doit durer plusieurs semaines et leur faire traverser un territoire encore sauvage.



Tommy Lee Jones aime les plans larges sur les paysages arides, le silence, les gros plans sur les visages et ne raffole pas des scènes d'action - il préfère filmer ses acteurs - s'apesantir sur le visage fermé, marqué de son actrice principale, une Hilary Swank formidable. Il raconte comment ces jeunes épouses ont peu à peu sombré dans la folie - des mariages forcés, la diphtérie qui tue les nouveaux-nés, des époux violents - et puis ces terres sauvages, si hostiles. Ces femmes, qui ont souvent grandi à l'est, ne supportent pas cette vie ingrate.  Quant à lui, il s'accorde le rôle peu flatteur d'un déserteur, voleur, alcoolique mais qui va, le temps d'une rencontre, développer un sens du devoir envers ses jeunes femmes et réussira la mission.

Les flashbacks consacrés à ces trois femmes sont magnifiquement filmés même s'ils sont particulièrement difficiles à regarder - une image très éloignée de La petite maison dans la prairie - où l'on voit la violence infligée à ces épouses, mariées de force ou pas, qui peu à peu ont sombré dans la folie. Des scènes magnifiquement filmées (le travail sur la lumière en particulier). Je viens de finir de lire Le sillage de l'oubli de Bruce Machart, roman magnifique sur la vie ingrate de ces pionniers et plus spécialement sur le traitement indigne réservé aux femmes, et je trouve un parallèle entre ces histoires qui montrent la face cachée de cette conquête de l'Ouest, où le prix à payer était beaucoup plus fort. 




Le film a un rythme lent qui pourra rebuté certains, n'y allez pas en pensant voir l'acteur des MIB ! Ainsi, les voyageurs ne rencontreront que peu de dangers et j'ai été surprise par le sort réservé à un certain personnage. Mais j'ai aimé le cinéma de Tommy Lee Jones. Et j'ai adoré la prestation de ces actrices : Hilary Swank, Grace Gummer, Mirando Otto et Sonja Richter et l'apparition brève de Meryl Streep (la mère de Gummer dans la vraie vie). Un film dédié à la gente féminine, ça fait du bien !

Mon avis :


 

21 mai 2014

The Goldfinch by Donna Tartt (ou le Chardonneret)

J'ai fini de lire il y a quelques jours le roman de Donna Tartt, qui lui a valu le Prix Pulitzer : The Goldfinch. Je l'ai lu en anglais d'où le titre. Le chardonneret est la traduction littérale du titre anglais. J'arrive un peu tard par rapport à la blogosphère mais je suis fière de moi, en effet, ceux qui me lisent, ont su que pendant presque deux mois, aucun livre ne trouvait d'intérêt à mes yeux. Ma saison annuelle de sécheresse littéraire terminée, j'ai enfin pu avaler un roman de près de 700 pages (et deux autres romans). 

La romancière aura mis près de dix ans pour écrire ici un roman jugé magistral, portrait féroce de la haute bourgeoisie new-yorkaise et de l'Amérique, un mélange de Dickens et de Mark Twain.L'américaine réussit une prouesse qui lui vaut le Prix Pulitzer.

Je l'avoue sans détour, les premières années du héros, Théo Decker (le livre est à la forme narrative, à la première personne) sont passionnantes. L'enfant, élevé à New York, par une mère belle, intelligente et profondément aimante (totalement fantasmée par son fils) se retrouve soudainement orphelin lorsqu'un attentat à la bombe le prive de cette dernière alors qu'ils visitent le Met. Le jeune Théo, choqué par l'explosion, se saisit de la toile préférée de sa mère, The Goldfinch de Carel Fabritius (1654) peintre du XVIIème siècle et disparait. La toile, de taille minuscule, dépeint un oiseau, un chardonneret, enchainé à un perchoir à l'intérieur d'une maison.

Cette chaine est symbolique : le héros lui-même se retrouve enchainé à ce tableau, cette toile mystérieuse et envoutante  qui symbolise l'amour de sa mère, dont il n'arrive pas à accepter la disparition soudaine. 

Théo sera d'abord accueilli dans une famille de la haute-bourgeoisie new-yorkaise avant d'être embarqué à Las Vegas par son père, un homme qui symbolise ici l'Amérique des perdants, des déchus, ceux qui continuent de croire au rêve américain à coup de jeux (poker, paris sur le sport), son destin n'en sera que plus tragique. Le jeune Théo croise alors la route de Boris, l'adolescent russo-ukrainien, élevé dans l'ère de la mondialisation où tout s'achète, se paie et se vend. Les années passent, le jeune Théo vit de nouveau New York,  vendeur d’œuvres d'art à de richissimes familles qu'il arnaque en vendant de fausses antiquités et fréquente à nouveau la famille qui l'avait accueillie, mais il ne cesse d'être obsédé par la toile de Fabritius.

Donna Tartt (Copyright BBC)

Ce roman initiatique prend alors la tournure d'un thriller lorsque Boris lui avoue lui avoir dérobé l'original il y a des années et que les deux jeunes trentenaires s'envolent pour Amsterdam à la recherche du précieux tableau. Si j'ai moins aimé cette partie de l'histoire, j'ai adoré les disgressions de la romancière sur l'art en général : à travers l'obsession de son héros pour cette toile, elle analyse la fascination existante pour certaines œuvres d'art - comment celles-ci ont été élevées au rang de trésors culturels et sont devenues inestimables, comment explique-t-on la beauté, comment juger du prix d'une œuvre d'art ? Moi qui suis passionnée d'art, et qui fréquente beaucoup les musées, j'ai aimé cette réflexion.

J'ai commencé la lecture de ce roman avec difficulté, puis après deux ou trois chapitres, j'ai été emballée par le foisonnement de l'histoire, par les chapitres entiers consacrés à la rénovation des pièces d'antiquité, du travail du bois, par le détail apporté avec soin par l'auteur à chaque meuble, chaque pièce, par son talent pour transcrire l'atmosphère feutrée de l'appartement d'Andy, par l'écriture fluide et romancée, le rythme soutenu et le talent indéniable de l'écrivain pour retranscrire l'immense douleur de l'orphelin. 

Mais mon emballement a cessé au deux-tiers du roman, lorsque le héros est de retour à New York et s'enfonce dans une vie d'illusions, la drogue est son meilleure compagnon, incapable d'affronter ses fantômes, il vit dans le mensonge et ne semble jamais être capable de s'extraire des limbes dans lequel son esprit flotte depuis longtemps. 

Je me suis, j'avoue lassée du personnage principal et j'ai eu hâte de terminer la lecture, non pas que je rejette les dernières pages, passionnantes lorsque la romancière parle du beau, de l'art mais parce que je ne supportais plus ce héros, qui traine sa dépression de page en page - attachée au jeune Théo de 13 ans, celui de 30 ans m'ennuyait, voire m'exaspérait au fil des pages, son inertie particulièrement. Je suis quelqu'un de dynamique, battante or ici le personnage, pourtant orphelin à un très jeune âge ne connaît pas de résilience - il se complait dans son malheur et la perte de la toile ne va engendrer chez lui aucun déclic. Il sombre à Amsterdam et entraine le lecteur avec lui.  Enfin, j'avoue que la partie thriller (en Europe) ne m'a absolument pas parlée, ni enchantée.

Cependant, grâce à ce livre, j'ai découvert tout le talent de l'écrivain, et j'adore son style - j'avais acheté en poche son roman le plus célèbre Le Maître des Illusions que je réservais et je sais que je vais être ravie de retrouver ce style si riche et si fluide. 

J'espère ici que je ne tomberais pas en désamour du héros, Richard Papen comme ce fut le cas avec Théo Decker. 

En résumé, ce livre est passionnant, et m'a totalement séduit lorsque que l'écrivaine traite des œuvres d'art (je suis tombée amoureuse de ce chardonneret) ou lorsqu'elle dépeint la haute bourgeoisie, je le conseille vivement à tous les amoureux des livres. Ce roman mérite pleinement son prix. 

Je le conseille en anglais, of course! 

15 mai 2014

Pas son genre

Je suis allée voir Pas son genre après avoir lu une critique enthousiasmée du film - un film français qui montre une histoire d'amour différente, un peu comme (500) Days of Summer qui revisitait l'amour d'amour.

Lucas Belvaux a choisi d'aborder dans cette histoire d'amour inattendue entre une coiffeuse provinciale et un professeur de philo parisien "la violence culturelle", comme il le dit lui-même. En fait, le réalisateur revisite ici le mythe de l'histoire d'amour entre un beau prince et une roturière, et montre à travers cette belle histoire la différence de "classes sociales".

De plus, j'aime beaucoup Émilie Dequenne et j'étais très curieuse de la voir dans ce film, interprétée avec brio cette jeune femme simple,  prénommée Jennifer, mère célibataire, coiffeuse à Arras.  Elle croise par hasard lors d'une coupe le beau Clément (Loïc Corbery), jeune professeur de philosophie parisien, envoyé à Arras pour un an.  Clément vit littéralement cette mutation comme un traumatisme, Parisien acharné, il se voit "mourir" en province - la faculté s'arrange pour qu'il puisse rentrer dès le mercredi soir à Paris, où il s'enferme au milieu de livres, attablé à l'écriture de son prochain roman. Sa rencontre avec cette charmante coiffeuse est totalement inattendue pour lui qui ne fréquente que des femmes bourgeoises et intellectuelles.

Clément et Jennifer n'ont strictement rien en commun, mais l'attirance est réciproque et ils vont peu à se peu se rapprocher.  Deux mondes entrent en collision. Lucas Belvaux et Emilie Dequenne décrivent avec bonheur le personnage de Jennifer, qui est selon leurs mots "pleinement dans la vie" et ils ont raison. Car on l'envie - elle est heureuse, satisfaite de sa vie, adore son enfant, ses amies et ses soirées où elle joue du karaoké avec ses amies. Le réalisateur a d'ailleurs dit avoir pensé qu'elle vivait dans un film de "Jacques Demy" et il n'a pas tort. On s'attache tout de suite à elle, je me suis reconnue en elle même si je suis très différente.

Car, je me suis aussi reconnue dans le personnage de Clément, je vis à Nantes, "Le petit Paris", dans le centre, j'aime lire, aller aux expos, les émissions culturelles - bref, vous aurez compris que j'ai beaucoup aimé ce film. Il y a des scènes touchantes, ces scènes où avec ses mots, Jennifer assume cette différence culturelle, des scènes difficiles (cette violence culturelle dont le réalisateur parle) et puis aussi quelques scènes très drôles, comme celle du karaoké (l'amie qui m'accompagnait a eu un fou rire énorme). 

J'ai découvert par la même occasion l'acteur Loïc Corbery qui interprète avec en tact et parcimonie cet intello parisien, rigide, élevé dans un milieu grand bourgeois, amoureux de Kant et de Proust (autre scène très drôle du film : sa participation lors d'une conférence à Paris avec un philosophe suédois, le nom même de la conférence a fait rire toute la salle) et qui cache sa vie amoureuse lors de ses retours à Paris. Le réalisateur n'épargne ici personne, et surtout pas le parisianisme aigu (il dit lui-même ressembler profondément aux deux personnages).


Lucas Belvaux cherchait un acteur qui puisse lire les extraits de Kant ou Proust avec talent, et son choix s'est naturellement porté vers un acteur de la Comédie française qui avoue cependant se sentir dans la vie beaucoup plus proche du personnage de Jennifer.  J'ai vu une interview depuis des deux acteurs qui se sont attachés à leurs personnages et ont une vision plus optimiste que celle du  réalisateur et veulent croire profondément au succès possible d'une telle histoire. Et ils n'ont pas tort, le Prince William a bien épousé Kate, non?

Un très beau moment et qui prouve que le cinéma français peut aussi produire des comédies romantiques intelligentes, différentes et profondément humaines.  Un joli moment de cinéma. A voir et à revoir.

Mon avis :


08 mai 2014

My addictions of the week

Au menu cette semaine : Funny People, Angela Davis, Michel Gondry, Larry Watson, The Julliard School, les bisons de Broken Heart, l'écume des jours, Judd Apatow, Justice, documentaires, Montana, 1948, Audrey Tautou, The Goldfinch...



Copyright Knowledge and Light

05 mai 2014

Le duel

Vous allez vous lasser - mais lorsque l'un de vos auteurs préférés, Arnaldur Indriðason, sort un livre, Le Duel qui une fois de plus, vous emporte, vous emballe, vous plaît tant que vous le dévorez en une journée - vous ne pouvez pas ne pas lui consacrer un billet. Arnaldur Indridason a donc recommencé. L'auteur islandais a signé un polar magistral - d'abord, parce qu'ici, contrairement à Betty, l'auteur est fidèle à ses trois obsessions : l'histoire (celle de Marion Briem), l'Histoire (la grande) et le genre policier.

Indridason a souhaité s'offrir quelques vacances loin de son personnage fétiche Erlendur, sans pour autant quitter le genre policier, ni même quitter Erlendur puisqu'il vous emmène dans les années 70 à la rencontre de Marion Briem - les addicts des enquêtes d'Erlendur connaissent ce personnage, le mentor d'Erlendur. Tout au long des enquêtes de notre héros, on le découvre vieux, malade (la tuberculose) mais qui inspire toujours autant le respect à son protégé. 

Mais revenons au duel - ce duel, c'est celui qui oppose à l'époque de la guerre froide, en 1972 les deux plus grands joueurs d'échecs au monde : Fischer pour les USA et Spassky pour l'URSS. Le duel est organisé sur l'île islandaise qui devient soudainement le centre du monde. Envahi d'espions, Briem est chargé d'enquêter sur le meurtre brutal d'un adolescent dans un cinéma.  Très vite, l'enquête va entrainer l'inspecteur Briem sur de multiples pistes dont celle de l'espionnage. 

L'enquête est comme toujours, chez le romancier islandais, rondement menée - Indridason adore y mêler l'histoire de son pays et se sert de son île natale comme la centrifugeuse de toutes les crises mondiales qui sévissent. La guerre froide, déjà évoquée à plusieurs reprises dans ses romans (comme de la présence de l'armée américaine) est au centre de l'histoire, symbolisée par le duel entre les deux joueurs d'échecs. 


Rassurez-vous, pas besoin de connaître les échecs pour suivre cette partie. Et comme à son habitude, le romancier entre dans la vie de ses personnages par la petite porte : ici la maladie de Briem, la turberculose,  qui comme les fjords qui obsèdent Erledur, accompagne l'inspecteur dans toute sa vie. J'ignorais tout de cette maladie (des opérations qui déforment les corps), des enfants envoyés loin de leurs familles, pour des mois, voire des années, soigner cette maladie et surtout l'impact de cette maladie sur l'Islande. Le pays fut apparemment victime dans les années 50 d'une véritable épidémie de tuberculose emportant de nombreuses vies, surtout celles de jeunes enfants.

Encore une histoire dans l'histoire et comme à son habitude Indridason dirige cette chorégraphie avec une main de maître. Quel plaisir de retrouver le romancier, son style épuré, chaque mot choisi avec soin - et en moins de trois heures j'avais dévoré le roman.

Pour les abonnés au magazine Lire, vous aurez lu la passionnante interview de l'auteur islandais - sa passion pour l'histoire de son pays et ce qui me passionne le plus : le processus d'écriture du romancier. Chaque mot est pesé et l'auteur rature peu - bref, il continue donc de m'impressionner. Je vous invite à lire son interview. 

Bref, vous l'aurez compris, un vrai coup de cœur !