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22 octobre 2014

Mommy

Il m'est étrangement difficile d'écrire un billet sur Mommy. Pourtant, j'ai bien vu le film et je l'ai aimé, mais aujourd'hui deux jours après, j'ai peur de ne pas savoir utiliser les bons termes, ou exprimer correctement ce que j'ai ressenti en découvrant l’œuvre de Xavier Dolan. Un vrai coup de foudre pour l'histoire, et particulièrement, pour le personnage de Kyla.

Car contrairement à beaucoup d'entre vous, je n'ai pas vu les premiers films du jeune réalisateur québecois. J'avais pourtant entendu et lu les critiques à l'égard de ses précédentes réalisations, et l'engouement autour de ce jeune homme, prodige en son état. 

Le buzz créé autour de ce film lors du Festival de Cannes avait aiguisé ma curiosité, puis celle-ci était retombée. J'avais remarqué en regardant la bande-annonce le choix particulier de l'auteur du film de privilégier un certain format ainsi qu'une photographie et une lumière distinctes. 

La bonne surprise vient plutôt de l'histoire, du scénario (les personnages sont magnifiquement écrits) et cette construction particulière entre trois personnages qui peu à peu vont se rapprocher pour former de manière éphémère une seule et même entité. Xavier Dolan choisit de plonger le spectateur dans un futur virtuel, où une loi permet dorénavant aux parents, confrontés à un enfant violent, de le placer à l'hôpital.  Si la fin du film est prévisible, cette relation tridimensionnelle est vraiment unique.



Steve Desprès est un enfant à problèmes, orphelin de père depuis trois ans, il a développé de forts troubles à l'adolescence, diagnostiqué hyper actif, dans une relation trop fusionnelle avec sa mère, il n'arrive pas à contrôler ses crises de violence et est placé dans un centre. Mais celui-ci décide de s'en séparer après qu'il a mis feu au bâtiment, blessant gravement un autre adolescent. 

De retour chez lui, il retrouve sa mère, la belle et fantasque, Diane dite "Di". Leur relation est fusionnelle et explosive. Très vite, elle se retrouve sans emploi et endettée, les retrouvailles avec son fils sont vite remplacées par des scènes de violence et la peur de cette quarantenaire dépassée par les évènements, dépassée par la vie. C'est alors que leur voisine d'en face, la très discrète Kyla, va faire son entrée dans leur vie et briser ce couple malsain, et apporter l'oxygène nécessaire à leur survie. 

Elle-même éprouvée par le deuil*, elle va trouver chez ses voisins, dont la vulgarité, la gouaille et le comportement peuvent effrayer, un cocon où elle va pouvoir se libérer et apprendre de nouveau à vivre, à respirer, à rire. Je ne vous en dis pas plus, mais sachez que si la relation mère-fils est intense, je l'ai déjà connue à travers d'autres films, qui, je l'avoue, m'ont plus marqués (We need to talk about Kevin), j'ai largement préféré le personnage de Kyla - cette femme, professeur en disponibilité, atteinte d'aphasie, dont le visage si fermé va s'ouvrir au monde et où au contact de Di et Steve, ses problèmes de langage vont peu à disparaitre. Il est d'ailleurs très intéressant de voir à quel moment (en présence de qui), ils réapparaissent. 



Un personnage magnifique, émouvant et qu'on a envie de protéger, à l'instar de Steve, seul conscient de sa brisure.  J'ignore comment Dolan l'a créé, mais c'est un des plus beaux personnages qu'il m'ait été donné de rencontrer. 

La relation mère-fils, le désir si intense de cette femme de sauver son fils de ses troubles est aussi très touchant. On partage avec elle chaque moment, chaque bataille face à une guerre qui semble insurmontable.

Les acteurs québecois sont formidables - la mère interprétée par une formidable Anne Dorval, le fils - dont les accès de colère succèdent aux marques d'amour, est joué par un jeune acteur talentueux Antoine-Olivier Pilon et enfin le personnage de Kyla, interprété tout en pudeur et douceur par Suzanne Clément

J'ai évidemment beaucoup aimé les scènes où le réalisateur privilégie la musique et l'image aux dialogues (qui en québecois requièrent une sacrée attention, l'utilisation de mots anglais est assez impressionnante dans le langage parlé). Le format utilisé par le réalisateur ne m'a pas dérangé et la scène où la magie opère, est très belle puisqu'elle accompagne ici un pur moment de bonheur entre les trois protagonistes, soudainement délivrés de leurs problèmes, comme libérés. Ce trio fragile est vraiment magnifique et intense, le spectateur rêve que cet instant magique dure à jamais, mais la vie reprend ses droits.



Je n'ai pas pu m'empêcher, lors de la diffusion des premières images, où Di est filmée avec cette lumière si particulière, automnale, à avoir penser au film The Tree of Life - comme Terrence Malick.  Ainsi, Dolan filme toujours les moments de félicité avec cette lumière qui apporte une aura aux personnages et comme le réalisateur américain, il fait une véritable déclaration à toutes les mères.
Et cette déclaration ne porte pas uniquement sur le personnage de Di, mais également sur celui de Kyla, une mère amputée de son enfant. 

En écrivant ces mots, toutes ces images me reviennent. Aussi, au final, si je reconnais parfois certaines influences extérieures dans le choix de la lumière ou de la réalisation, je ne peux qu'être impressionnée par l'écriture des personnages - j'ai lu ou entendu, je ne sais plus, une interview du jeune Xavier Dolan, qui disait que ce film, pour lui, n'était là que pour faire ressentir aux spectateurs, des "émotions" et que s'il y parvenait, alors pour lui il avait atteint son objectif.

Objectif largement atteint ! 

Une dernière note sur la musique, qui comme les vêtements, plongent le spectateur, non pas dans le futur, mais dans les années 90 -  quel plaisir d'entendre de nouveau Colorblind (ce titre des Counting Crows avait, à mon époque, été souvent critiqué pour son côté marshmallow) et de les voir chanter du Céline Dion, un autre grand moment de ce film. Si cette sélection musicale est critiquée aujourd'hui, moi je l'ai, au contraire, beaucoup aimée et je pense que je vais me procurer le CD. 

 (*) Si j'ai choisi de révéler ce détail, c'est qu'une amie l'ayant vu, a été aussi surprise d'entendre ci et là des journalistes déclarer qu'ils ne comprenaient pas "cette femme triste qui bégaie".

Mon avis :

2 commentaires:

  1. Quel beau billet ! Très complet , de plus.
    Ravie que nous ayions fait connaissance , Electra ;-)

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    1. Merci ! Ravie aussi !
      Je vais continuer à parcourir ton blog mais en ce moment c'est un peu la course au boulot et à la maison
      Je vais profiter du long week-end en perspective !

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