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30 octobre 2014

Samba

Lorsque la blogosphère s'est emparée du dernier film d'Olivier Nakache et d'Eric Toledano, Samba, j'ai eu, je l'avoue quelques hésitations. J'ai aperçu des retours enchantés puis ce fut autour des déçus de se manifester, au point que lorsqu'on m'a offert d'aller le voir, j'ai hésité. Une collègue venait de me dire que le film (qu'elle n'avait pas vu) était plutôt décevant, souffrant de longueurs et les personnages tournant en rond. 

Aujourd'hui, je me dois de la remercier - car partant avec cet a priori négatif, j'ai eu la chance de voir celui-ci totalement balayer par des comédiens engagés, une histoire émouvante et beaucoup, beaucoup de chaleur humaine

C'était un challenge pour les deux réalisateurs et leur comédien fétiche, Omar Sy - d'aller de l'avant, après le succès monumental d'Intouchables. Ce challenge l'était tout autant pour les spectateurs, qui espéraient retrouver le personnage de Driss.




Avant de raconter l'histoire, je dois préciser, que j'y allais, aussi, pour revivre une partie de mon passé, car j'ai été bénévole à la Cimade - aussi le sujet m'était très familier. J'y ai retrouvé bon nombre de sensations et sans doute l'émotion que j'ai ressentie en voyant ce film provient aussi de mon expérience personnelle. Si l'association est, il est vrai, souvent représentée par des bénévoles âgés, ma ville, Nantes - reste une exception, la majorité des bénévoles ayant moins de 25 ans (et étant une bonne trentaine à mon époque). 

Mon seul regret aura été que le film n'explique pas aux spectateurs, le rôle essentiel joué aujourd'hui par quelques associations face à la machine judiciaire implacable qui n'offre plus aucune aide ou soutien aux demandeurs d'asile.  Mais, je devrais, je pense consacrer à un billet entier afin d'expliquer le véritable parcours du combattant que doivent affronter les immigrants à leur arrivée en France, où le système d'accueil a pratiquement disparu, contrairement aux discours que martèlent ces jours-ci certains hommes ou femmes politiques en mal de solution à la crise économique.



Mais revenons au sujet : le film.  Nous suivons ici les chemins croisés de quatre personnages : Alice (Charlotte Gainsbourg) cadre sup, en arrêt maladie suite à un burn out, choisit d'intégrer la Cimade pendant son arrêt maladie et accompagne pour sa première mission (dans un centre de rétention) la jeune et bouillonnante Manu (Izaïa Higelin) - personnage que vous croiserez dans n'importe quelle assoc !  Face à elle, le taciturne Samba (Omar Sy), originaire du Sénégal qui vit en France depuis près de dix ans et travaille comme commis dans la cuisine d'un grand hôtel. Totalement intégré dans sa tête, il est soudainement renvoyé à la réalité : il n'est plus ou moins qu'un vulgaire clandestin sans-papiers, malgré les dix années passées en France (où il a cotisé et payé ses impôts).

La Cimade obtient sa libération en échange d'une OQTF (que de souvenirs pour moi), un petit papier qui vous identifie en sans-papiers mais surtout fait de vous la proie rêvée de tout officier de police : vous êtes sommé de quitter le territoire français. Du jour au lendemain, Samba doit faire attention à ne pas éveiller le moindre soupçon, il ne peut plus retourner travailler (malgré la promesse d'embauche), éviter le métro ou certains endroits-clés  et doit sans cesse user de fausses identités pour accepter des jobs sous-payés et dangereux (généralement dans le bâtiment ou dans la sécurité). Il va alors se rapprocher d'Alice et tous deux, chacun à leur manière vont s'unir pour lutter contre leurs enemmis invisibles. 

Sur son chemin, Samba croise Wilson, un sans-papier brésilien (Tahar Rahim) qui va lui redonner courage et sourire, mais ne pourra pas empêcher la tragédie de prendre place. Wilson aussi cache un grand secret qu'il pourra confier, pour la première fois, à son nouvel ami.  C'est un duo à la Laurel et Hardy qui est vraiment très amusant à suivre.

La réussite du film, selon moi, ne tient pas uniquement au jeu des acteurs (tous formidables, des bénévoles de la Cimade aux sans-papiers) mais aussi aux petites touches d'humanité ci et là - comme cette soirée de fête à la Cimade - où les dialogues ont fait rire la salle entière, idem pour les scènes de vie quotidienne à l'association, lorsque les bénévoles tentent de communiquer avec les demandeurs d'asile - la salle était pliée en deux, et moi ça m'a rappelé énormément de souvenirs ! 

Oui, on rit et on en a besoin - mais les réalisateurs ont su, aussi montrer, toute l'absurdité d'un système, qui contribue à faire fonctionner le marché noir (dans le bâtiment) et à exploiter toutes ces personnes vulnérables. La scène où Samba sort libre du centre de rétention mais avec cette fameuse OQTF exprime pour moi toute l'absurdité du droit français.

L'histoire est adaptée du livre de Delphine Coulin, Samba pour la France, il ne lui est pas totalement fidèle mais qu'importe, les réalisateurs ont réussi à créer chez le spectateur deux heures de voyage, dans une autre France, celle des sans-papiers, qui doivent sans cesse se cacher, et si effectivement, le film peut parfois sembler long, comme lorsqu'on suit le héros enchainer petits boulots (comme le gardiennage la nuit), c'est fait volontairement pour que le spectateur saisisse à quoi ressemble la vie d'un clandestin, loin de notre petite vie pépère. 



Et puis, il y a l'émotion que les acteurs ont su faire ressortir, le personnage d'Alice jouée par Charlotte Gainsbourg va s'ouvrir peu à peu à la vie, comme un papillon qui sort de sa chrysalide. Son visage s'illumine et lorsqu'elle danse, c'est une très belle femme. J'adore cette actrice. Elle est magnifique. Omar Sy joue tout en justesse cet homme, persuadé de sa bonne foi lorsqu'il se présente à la préfecture avec sa promesse d'embauche et puis Tahar Rahim, dans un rôle si surprenant, si éloigné de ses précédents rôles, il est tout simplement génial. Il ne cesse de m'épater. 

Et puis, j'ai ri - beaucoup. Vu le sujet du film, je ne m'attendais pas à rire autant et la salle, presque pleine, a ri tout autant. 

Je remercie les auteurs d'avoir adapté ce roman au cinéma. Ce film dévoile ici les visages de ces sans-papiers, leur donnent un nom, une histoire et une humanité, qui leur fait tant défaut dans les médias.
Je ne vous cacherai pas que j'avais très envie de retourner à la Cimade - j'ai du arrêté car mon travail ne coïncidait pas avec le dévouement que réclame cette forme de bénévolat, mais je n'ai jamais eu autant la sensation d’œuvrer pour le bien et être utile à mon pays, qu'en y travaillant. 

Alors si vous ressentez le besoin d'un peu de chaleur humaine et le besoin de rire, n'hésitez pas à aller voir Samba ! 

Mon avis : (♥)

2 commentaires:

  1. J'ai adoré ce film, que j'ai aussi trouvé chaleureux, plein de notes d'humour et je trouve que le duo Charlotte Gainsbourg / Omar Sy fonctionne à merveille ! Mais tous les comédiens jouent parfaitement, et je n'ai pas trouvé aucunes longueurs dans ce film (sauf la fin que j'ai trouvé un peu bizarre).
    Bises

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  2. Oui, pareil - il fait du baume au coeur, je suis étonnée que beaucoup de gens soient sortis déçus car on retrouve la même fibre humaine que pour les Intouchables, le thème de l'autre, du différent.
    Merci !

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