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06 février 2017

Moonlight

A part l'affiche du film, et ses 8 nominations aux Oscars, j'ignorais tout du film de Barry Jenkins. Quelle erreur ! Heureusement, j'ai corrigé tout cela en allant voir le film en v.o (sous-titrée) vendredi soir. Et quel coup de coeur ! 

Moi qui suis sortie mitigée de La La Land - et le temps m'a donné raison : j'ai  depuis presque tout oublié de ce film. Alors que j'ai pleuré devant Moonlight. Pleurer d'émotion, cela ne m'était pas arrivé depuis longtemps au cinéma, croyez-moi. 

Le réalisateur a tourné dans le quartier de son enfance, Liberty City à Miami. Un ghetto aux maisons jaunes, bleu ou roses plombé par un soleil éternel. Dépaysant pour les spectateurs habitués aux tours grises et sombres de New York ou de Chicago. Mais la pauvreté est là. La violence aussi. Et la solitude. 

Ici, la population, en majorité noire (et d'origine cubaine en partie) survit comme ailleurs : des trafics en tout genre et la drogue (crack, met, etc.) qui détruit des centaines de vies. Dont celle de la mère de Chiron. Ce petit gamin chétif est élevé par cette dernière, Paula, aide-soignante, elle travaille à toute heure, et depuis peu sort beaucoup. Elle délaisse son fils. Ce dernier est le souffre-douleurs de son école, la première scène est frappante : Chiron fuit ses attaquants et se réfugie dans une maison abandonnée. 

Les coups pleuvent. On a mal pour Chiron. C'est alors que Juan (Mahershala Ali) apparaît - ce dernier est un dealer respecté dans sa communauté. Il faisait le tour de ses revendeurs lorsqu'il a vu la scène. Il vient à la rescousse du gamin qui refuse de parler. Il le recueille chez lui et le gamin va trouver en lui, et sa compagne, Theresa (magnifique Janelle Monae), un semblant de vie de famille. La mère s'offusque mais celle-ci est dévorée par son addiction au crack, dont le revendeur n'est autre qu'un sbire de Juan. Le petit comprend et subit en silence. Les années passent. 




Chiron est à présent adolescent - il est à nouveau seul, et à nouveau le souffre-douleurs de son lycée. On comprend très vite que sa démarche mal assurée, sa timidité cache autre chose, que tous soupçonnent depuis son enfance : une homosexualité latente mais jamais assumée dans ce monde de brutes. Dans cette communauté, les hommes doivent être forts, machos, sexistes. Son seul ami, Kevin, n'a-t-il pas été envoyé en colle pour avoir couché avec une fille dans son école ? Lui reste la risée des autres - et pourtant, Barry Jenkins évite tout misérabilisme. 

Il y a sa caméra, la lumière, les angles de vue - Barry se focalise sur les visages, le regard. Des scènes mythiques, où il plonge son visage dans l'eau puis se regarde longtemps dans le miroir. Le spectateur est hypnotisé. Chiron bascule. Sa vie bascule. 

Troisième acte : Chiron est adulte. Il vit dans un autre ghetto, celui d'Atlanta.  Dix ans ont passé. 

Je ne vais pas raconter l'histoire - mais cette pièce en trois actes est tout simplement UN PUR MOMENT DE BONHEUR même si l'histoire est parfois triste. Elle reste lumineuse et surtout pleine d'espoir. Trop longtemps, les Américains ont privilégié des happy end qui nous rendaient dingues, puis ce fut l'inverse - la violence, la noirceur et les fins tristes ont pris le relai. 

Adaptée d'une pièce de théâtre par Barry Jenkins, l'auteur se défend d'avoir voulu faire "passer un message". Il y a trois ans le Président était noir mais le réalisateur savait qu'en abordant le sujet de l'homosexualité chez les jeunes hommes noirs des ghettos, il allait forcément toucher un sujet sensible et faire de la politique. Pourtant, le film, s'il tourne autour de ce sujet, se focalise surtout sur l'impossibilité pour ces jeunes hommes d'exprimer  leurs sentiments, leurs émotions. Chiron vit enfermé, emprisonné dans son propre corps. Il n'arrive pas à articuler plus de trois mots. Cette souffrance, on la porte avec lui. 

C'est dans le troisième acte que la parole va venir libérer Chiron et sa mère. Un acte proche de la tragédie. Je me souviens de la tension palpable, ressentie par le personnage, mais aussi par l'ensemble des spectateurs. Ma soeur et moi avons tremblé, craignant que tout se casse la figure. 

Un énorme coup de coeur et en écrivant ces mots, je me dis que je veux revoir ce film, très vite. Deux autres spectateurs, assis à mes côtés, ont cru aller voir un simple film de gangstas ! Aussi, forcément, ils ont été surpris mais enchantés.  Enfin, mes amis hommes ont moins aimé la dernière partie (où les sentiments l'emportent), sans doute mal à l'aise face à l'homosexualité ? J'ignore, parce que nous les filles, on tremblait comme des feuilles mortes et on a pleuré devant tant d'amour et surtout face à cette solitude que vit Chiron.

Et je suis ravie de découvrir un nouveau réalisateur qui offre des scènes cultes au cinéma, et qui maîtrise aussi bien le rythme que le tempo (une musique magnifique) et a choisi magnifiquement ses acteurs. 



En premier, Mahershala Ali, que j'ai découvert il y a plus de dix ans dans la série Les 4400, puis dans plusieurs films et enfin dans la série House of Cards. Je suis trop contente qu'il soit nommé pour le meilleur second rôle aux prochains Oscars ! 

Un énorme bravo aux trois acteurs qui jouent Chiron à trois époques : Alex R.Hibbert (Little), Ashton Sanders (Chiron) et Trevante Rhodes (Black).  A tous les acteurs, dont Naomie Harris qui joue le rôle de Paula, la mère de Chiron et qui a aussi obtenu une nomination aux Oscars ! 

Et à tous, en particulier André Holland qui joue Kevin adulte. La tension sexuelle entre les deux acteurs est à couper le souffle ! et ce type est bourré de charmes ;-)

Courez au cinéma ! C'est le meilleur film de cette rentrée. 

La bande-annonce, que je n'avais pas vue avant de voir le film, pour ceux qui auraient encore des doutes : 



Mon avis : 

12 commentaires:

  1. Je suis sortie mitigée de La la land moi aussi, et même ressenti pour Moonlight, un vrai beau film !

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    1. ah contente de voir que des gens ont eu les mêmes sentiments concernant La La Land et pour Moonlight (gros coup de coeur!)

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  2. Sans aucun doute il me plaira! J'avais lu quelques avis et j'ai mis ce film en priorité!

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    1. super ! vu les autres commentaires, ça devrait te suffire ;-)

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  3. J'ai vu Moonlight en 2016 et il s'agit de mon meilleur film de l'année.
    Comme toi, j'ai trouvé ce film sublime et bouleversant. J'ai pleuré, beaucoup, jusqu'à une demi heure après le film!

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    1. Oh oui, en revoyant la bande-annonce pour écrire ce billet, je tremblais encore ! ma sœur a aussi beaucoup pleuré. De belles larmes.

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  4. Vu hier et a-do-ré! Pudique, touchant, magistral "Moonlight". Sinon pas d'attrait de prime abord pour "La la land"... Pas prévu sur ma liste en dépit de touuuutes les bonnes critiques :)

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    1. ouiiii ! pudique, touchant, magistral ! tu as tout dit ! ce film est maîtrisé de A à Z et les acteurs .. bon je me répète ! Pour La La Land, je vais être méchante mais passe ton tour ! (sur petit écran ça marche). A présent j'attends de voir LION ! et le film sur les ingénieures noires à la NASA (le titre m'échappe), il sort en mars.

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  5. Ah c'est intéressant, les avis sont très divergents sur ce film.

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    1. Oui, j'ai lu l'avis d'une personne déçue par la fin, qu'elle a trouvé trop longue. J'ai parfois l'impression (je suis la première à le faire) qu'on est habitué à ce que tout aille vite de nos jours, et qu'on a plus la patience d'attendre (et d'imaginer dix mille fins possibles). Moi je l'ai vécu totalement inversement, j'ai stressé et attendu, et croisé les doigts et pleuré !
      Ce film est mon préféré, loin devant La La Land. J'ai vu Loving (billet à venir) que j'ai aussi beaucoup aimé et je vais voir Lion. Un ami a adoré et l'a trouvé encore meilleur.

      Mais, bon, je juge par rapport à mes propres émotions. Et certains n'aiment pas trop, sans l'avouer, des histoires d'amour masculines. Surtout mes amis hommes, pourtant ouverts mais le voir à l'écran....

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  6. Comme toi l'émotion m'a envahi à la projection de ce film, et j'en ai essuyé des larmes... je vais attendre encore un peu et aller le revoir. J'ai été happé par Chiron, et Juan comme jamais depuis longtemps par des personnages de fiction, difficile de les laisser partir avec le générique de fin..
    Vivement le résultat des Oscars !

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    1. youpi ! Oscar du meilleur film ! je ne voyais pas comment il pouvait lui échapper ! pareil, l'émotion entre ces deux hommes - un très beau moment de cinéma. De l'émotion pure. Et les images, la photographie. Lui collé contre le mur dans la cuisine de Juan, incapable de parler ... ah !

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