!-- Font Awesome -->

10 août 2015

Oriana Fallaci

Je suis allée au cinéma curieuse de suivre le parcours d'une des plus célèbres photo-reporter du monde, Oriana Fallaci dont je ne connaissais pas du tout le travail. Ce biopic aborde ici tout un pan de l'histoire mondiale vu à travers le regard implacable d'une femme déterminée, une interviewer hors-pair prête à prendre tous les risques : de la Dolce Vita au 11 septembre, Oriana a parcouru la planète : la guerre du Vietnam, la Grèce des colonels ou l'Iran de Khomeiny. 

J'ai appris un peu plus sur le parcours extraordinaire de cette femme en allant sur Internet afin de préparer ma chronique. Ainsi, j'ai découvert qu'elle a été blessée par balles (à trois reprises) au Mexique juste avant les Jeux Olympiques de 1968. 

Le film a un format classique, il commence avec Oriana (Vittoria Puccini), de retour à Florence, après avoir été diagnostiquée (en 1999?) pour un cancer (du sein). Celle-ci possède une magnifique maison où s'entassent ses souvenirs dont des milliers de photos. La quinquagénaire a engagé une étudiante, Lisa (Francesca Agostini), pour les archiver. 

Le film n'aborde cependant pas l'enfance de la jeune femme, ce qui aurait été intéressant compte tenu de ses positions sur les femmes en général (liberté sexuelle,le mariage, le travail) mais les débuts d'Oriana, reporter à Hollywood. La jeune femme, née en 1929 à Florence,  va alors aiguiser son talent de journaliste en interviewant les stars hollywoodiennes et en publiant un livre dont la préface sera signée Orson Welles. Mais Oriana veut aller sur le front, les paillettes l'ennuient.  


Le réalisateur a choisi d'ignorer l'attentat dont elle est victime au Mexique (pourquoi?) et de la montrer lorsqu'elle réussit à persuader le rédacteur-chef de l'Europeo, le journal pour lequel elle travaille de l'envoyer sur le front, au Vietnam, en 1968. La jeune y restera longtemps. Si les images sont impressionnantes (mêlant de vraies images à des fausses), j'ai été fortement dérangée par deux choses :
- lorsque Oriana suit une troupe américaine partir à l'assaut, le réalisateur italien y ajouté de la musique des sixties. Comme si, depuis Good Morning Vietnam ou la série China Beach (dont le générique était le fameux Paint it Black des Rolling Stones), il était impossible de montrer cette guerre sans y ajouter cette musique. Or c'est totalement erroné et inapproprié, le résultat est à l'inverse, selon moi de l'objectif : il détourne l'attention du spectateur loin de l'horreur de cette guerre. 
- le traitement des voix : Oriana est italienne et parle italien avec le reporter français (Stéphane Freiss) et lorsqu'elle interview les GI, c'est en anglais. Etrangement, leurs voix semblent avoir été ajoutées par-dessus cette musique assourdissante, des voix qui ne sont pas synchronisées avec le mouvement des lèvres (une micro seconde qui m'a fortement perturbée). 

Il n'en reste pas moins que ce passage au Vietnam est choquant, surtout la dernière image, devenue célèbre à travers le monde pour dénoncer la cruauté et dont j'ignorais qu'elle était signée Oriana Fallaci. Un moment très fort du film. A voir. 

Oriana part ensuite dénoncer la dictature des Colonels en Grèce, elle y rencontre une de leur victime, libérée après cinq ans d'emprisonnement, Alexandros Panagoulis (Vinicio Marchioni) et en tombe amoureuse. J'ai vraiment accroché au film à partir de ce moment là, plus de musique et une très belle histoire qui rejoint l'histoire avec un grand H.  On y voit deux personnes, follement amoureuses, lutter entre leurs sentiments et leurs dévotions à leur cause.  J'ai aussi découvert un pan de l'histoire sombre de la Grèce. 

Oriana repartira en Iran, elle sera la seule journaliste à obtenir une interview avec le nouvel homme fort du régime, l'Ayatollah Khomeini - une interview sans fards ! On est en 1979 (ou 80) et elle lui demande pourquoi les femmes doivent se recouvrir leurs corps, ce qu'il est en est de la liberté sexuelle ! Car Oriana dénoncera toute sa vie (ce qui fera débat à la fin de sa vie) la main mise de la religion sur la liberté des femmes à travers le monde. Et plus particulièrement l'impact de la guerre sainte dans les pays orientaux musulmans. Oriana n'a jamais peur de la controverse et de la vérité. 

Le film fait des allers-retours entre le passé et le présent, la maladie évolue, Oriana s'affaiblit et accepte la présence de la jeune étudiante auprès d'elle et lui confie ainsi des parts de sa vie. 

Oriana écrira des livres devenus célèbres, donnera des conférences à travers les facultés les plus célèbres (Yale, Harvard) et vivra des années à New York où elle possédait un appartement. Elle y sera le jour des attentats du 11 septembre. La reporter trimballera sa petite machine à écrire partout avec elle, continuant de rédiger ses articles et ses livres, même en 2001 ! 

Elle fera dire à Kissinger que la guerre du Vietnam était une épouvantable erreur et sera aussi vindictive auprès de Lech Walesa, Willy Brandt, Ali Bhutto, Walter Konkrite, Federico Fellini, Den Xiaoping, Yasser Arafat, Indira Gandhi, Golda Meir, Haile Selassie ...

La véritable Oriana Fallaci

Une femme passionnée et passionnante, libre et controversée. Les acteurs sont vraiment tous très bons : j'ai découvert ici le sosie d'Ornella Mutti, la très belle Vittoria Puccini, à la voix rauque et au regard gris et qui livre ici une très belle performance. 

Mon seul bémol vient du traitement des langues. Ainsi, j'ai vu le film en version originale, et au Vietnam aucun souci, on passe de l'italien à l'anglais mais la surprise vient lorsque Oriana obtient de pouvoir interviewer les trois Vietcong (supposés de pauvres gens de la campagne) et que l'un d'eux parle encore mieux anglais qu'elle ! A l'époque, c'était le français qui était enseigné. Puis en Grèce, de voir les souvenirs des séances de torture infligées à Alexandros .. en italien ? et pas en grec. 

Mais sinon, moi qui suis passionnée d'histoire et qui plus jeune admirait le métier de reporter, j'ai vraiment beaucoup aimé ce film qui montre une des femmes les plus libres et déterminées du siècle dernier. Une femme dont j'aurais aimé croisé le visage et le talent avant son décès, en septembre 2006. Une femme dont je vais chercher à me procurer les livres. 

Mon avis : 

4 commentaires:

  1. Je voulais aller le voir, et avec les vacances à l'étranger je n'ai pas pu! J'espère que je pourrai encore le trouver à l'affiche...
    En plus si j'avais su je serais allée le voir au lieu de La femme au tableau (que j'ai adoré), étant donné que le lendemain je partais en vacances et qu'il était diffusé dans l'avion !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. ah ça m'est arrivé aussi ! Oui, un très bon sur une femme méconnue mais quelle femme ! J'espère que tu le trouveras !

      Supprimer
  2. C'est bon je suis allée le voir ! J'ai beaucoup aimé car la vie d'Oriana Fallaci est passionnante et que l'actrice qui la joue est géniale par contre j'ai trouvé la construction trop classique (la femme âgée qui se retourne sur son passé en compagnie de la petite jeune...) et le traitement des langues est catastrophique comme tu l'indiques, soit le realisateur prenait le parti de tout filmer en italien, soit il choisissait de respecter les langues originales , là c'est un mélange ridicule ( les paysans vietnamiens illettrés parlent un anglais oxfordien, le serveur pakistanais parle italien, Khomeini parle français...) avec un gros problème de doublage (pour la jeune mariée pakistanaise notamment) ...dommage également qu'on ne voit pas plus de ses célèbres interviews...c'était une vraie furie en interview et on voit finalement peu cet aspect, à part l'épisode avec Khomeini et un peu au début avec Gina Lollobrigida. J'ai trouvé qu'il manquait une demi heure au film car il passe ebaucoup d'épisodes sous silence, Mais dans l'ensemble le film est vraiment intéressant et c'est un beau portrait. merci pour ton billet qui m'a motivée à aller le voir !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui traitement classique et comme toi le traitement des langues est affligeant ! Le doublage aussi, d'ailleurs je me suis sentie mieux en arrivant en Grèce car avant le doublage m'empêchait de profiter du film (décalage d'une milli seconde entre les lèvres et les voix)..

      Oui, je sais qu'elle menait des interviews musclées et son dernier livre a fait beaucoup de bruit mais je pense qu'ici il voulait plus mettre en avant une femme très moderne et libre à une époque où ce n'était pas évident !

      Contente que tu aies aimé en tout cas !

      Supprimer